24 février 2022
TEMOIGNAGE DE SEVERINE, 37 ANS,
SA VIE AVEC UNE MAV CEREBRALE
MAV localisée dans le lobe temporal droit, révélée par hémorragie et traitée par embolisation, radiochirurgie et neurochirurgie
Quand et comment avez-vous su que vous étiez porteuse d’une MAV cérébrale ? Comment avez-vous vécu l’annonce ?
J’ai découvert que j’étais porteuse d’une MAV cérébrale en 2016. J’avais alors 32 ans, et c’était un matin normal du quotidien : je me préparais pour amener notre fils de 2 ans et demi à la crèche. J’ai senti un mal de tête qui montait très vite : j’avais pourtant l’habitude d’avoir des céphalées, mais là c’était différent. Et ce qui m’a alerté, c’est que j’ai ressenti une raideur dans la nuque au bout d’une ou deux minutes. J’ai dû m’allonger sur mon lit, et j’ai appelé mon mari qui était en déplacement professionnel : sans lui et son insistance, je n’aurais jamais appelé le SAMU. Ils sont arrivés très vite, et au prix d’un effort colossal je me suis levée pour aller ouvrir la porte. Entre-temps, la voisine est venue récupérer notre fils : j’étais rassurée de le savoir pris en charge. Je me rappelle encore le trajet dans l’ambulance du SAMU : je ne savais pas ce qu’il se passait, et je pensais à une méningite… Puis, sur la base d’un scanner passé aux urgences, le médecin m’a parlé de la MAV et de l’hémorragie. Je n’en avais jamais entendu parler et je n’ai pas mesuré tout de suite l’ampleur de la pathologie (je pensais retourner au travail la semaine d’après !), ni à quel point j’avais eu de la chance (aucune zone fonctionnelle du cerveau n’avait été touchée).
La première nuit aux soins intensifs m’a fait ressentir un sentiment de solitude extrême. Pourquoi cela tombait sur moi ?
Quel a été le protocole de traitements défini (embolisation, neurochirurgie, radiochirurgie par rayons, abstention thérapeutique), et où en êtes-vous dans le suivi désormais ?
J’ai eu deux embolisations (avec une tentative de troisième qui n’a finalement pas eu lieu car trop risquée) en 2016-2017, puis une radiochirurgie par rayons Gamma en 2018. Le suivi se déroulait normalement avec une IRM annuelle.
Malheureusement, la MAV a saigné une nouvelle fois à l’été 2020 : j’étais alors enceinte de six mois et demi, sur notre lieu de vacances. Et cette fois-ci, l’hémorragie a été beaucoup plus importante : j’ai perdu connaissance et j’ai été héliportée au CHU le plus proche. Là-bas, on m’a posé une DVE (dérivation ventriculaire externe), mis dans le coma et devant des signes de souffrance fœtale (perturbations hémodynamiques liées à l’hémorragie au cerveau), les médecins ont fait naître en urgence notre petit garçon. Clément vivra un mois, dans une couveuse : il développa des complications liées à sa très grande prématurité. Il aura été une victime collatérale de la MAV…
Dans notre malheur, nous avions été pris en charge là où il fallait : une fois sortie du coma au bout de 5 jours, le neurochirurgien m’a expliqué qu’une neurochirurgie pour enlever définitivement la MAV était possible selon lui. Devant la perte que nous venions de subir et les risques à ne rien faire, j’ai décidé d’opter pour ce traitement : j’ai été opérée en novembre 2020 pendant le 2ème confinement, et la MAV a pu être enlevée. Je suis donc guérie : le suivi par IRM est désormais annuel pendant 5 ans, et sera espacé jusqu’aux 10 ans de la radiochirurgie.
Avez-vous eu des symptômes / séquelles et comment évoluent-ils dans le temps ?
Je n’ai eu aucune séquelle. Après la deuxième hémorragie, j’ai eu des gros problèmes de mémoire immédiate. Il m’a fallu plusieurs semaines pour arriver à retrouver des fonctions cognitives « normales », mais tout est revenu.
Que diriez-vous à un patient qui va subir prochainement une intervention médicale par laquelle vous êtes passée ?
Je dirais qu’il faut avoir confiance en l’équipe médicale qui vous prend en charge. On est sur un domaine médical de pointe, et aucune décision n’est facile à prendre, surtout quand on n’est pas soignant soi-même. Le feeling est donc primordial.
En ce qui me concerne, j’ai une reconnaissance infinie pour les personnels soignants qui m’ont pris en charge.
Qu’est-ce qui vous a aidé au quotidien ?
Mes proches ont été d’un soutien énorme… Que ce soit dans les périodes de traitements, de convalescence ou de deuil, ils ont toujours su m’épauler moralement et logistiquement : mon mari d’abord sans qui je ne sais pas comment j’aurais pu traverser cela, mes parents, nos familles et amis (même avec la distance) et notre fils aîné – du haut de son jeune âge, il nous a tracté et ramené dans l’instant présent, dans la vie.
Poursuivre mon activité professionnelle m’a également aidé. Je travaille dans une direction informatique d’une grande entreprise, et mes différents responsables ont toujours été compréhensifs face à mes arrêts de travail le temps des interventions et de la convalescence associée. Retrouver une activité intellectuelle « hors du monde médical » m’a fait énormément de bien, cela me permettait de ne pas penser qu’à la MAV.
Auriez-vous un conseil, une recommandation concrète pour les personnes qui vivent la même situation ?
Écoutez-vous : faites ce qui vous fait du bien à un instant donné (voir des amis, sortir, etc.). Il n’y a que vous qui savez ce qui peut vous aider.
Et ne restez pas seuls : vos proches peuvent vous écouter, mais n’hésitez pas aussi à contacter l’association NeuroMavFrance pour rompre le sentiment de solitude qu’on peut ressentir à l’annonce du diagnostic et après. Peu de personnes sont confrontées à cette pathologie (et c’est tant mieux !), et il y a quelques années j’aurais aimé pouvoir discuter de mes craintes avec d’autres patients, et surtout écouter leurs messages d’espoir.
Ne lâchez rien : même si vous connaîtrez des périodes de doute et d’abattement, vous êtes forts.
Un grand merci à vous pour ce témoignage ! (propos recueillis en février 2022)